P. 111 : Des Mazures au camp d'Austerlitz

Publié le par Jean-Emile Andreux

Jacob Liwschitz : sauvé pour avoir été détaché dans un camp annexe de Drancy

 

Né à Anvers le 13 octobre 1910, Jacob Liwschitz (1) fut mis au travail forcé au Judenlager des Mazures au profit de la firme française Vaisset. Marié avec une Belge, aryenne selon les critères nazis, il ne fut en conséquence pas transféré sur Malines le 24 octobre 1942 mais resta derrière les barbelés du camp ardennais jusqu'à sa fermeture.

N'ayant pas accompagné dix de ses camarades dans leur saut vers l'inconnu quand leur convoi, venant de Charleville, ralentit pour franchir l'Aisne à Sault-les-Rethel (2), Jacob Liwschitz fut inscrit sur le registre des entrées de Drancy, le 5 janvier 1944. Il reçut le matricule 10 924.

 

Carnet de fouille à l'entrée du camp de Drancy : "Reçu de 10 924 Mr LIWSCHITZ Jacob, les Mazures, la somme de vingt francs, 20 f, Drancy le 5 janvier 1944, Le Chef de la Police du Camp, P/O..." (Document : Mémorial de la Shoah, Paris)

 

Mais Jacob Liwschitz connut alors un sort singulier. Tous les autres "Mazurois" convoyés à Drancy, n'allaient y transiter que dans l'attente du convoi 66 vers Auschwitz, le 20 janvier (3). Lui fit exception (4) :

 

- "Le 4 janvier 1944 (5), le camp des Mazures a été évacué et j'ai été conduit à Dransig. Grâce à mon mariage avec une femme chrétienne, je n'ai pas été conduit au camp de concentration en Allemagne mais bien dans le camp du dépôt d'Austerlitz. Ce camp avait été mis en place à la gare d'Austerlitz, à Paris. Là, nous devions charger dans des wagons le mobilier qui avait été confisqué aux Israélites et à d'autres gens. La garde y était très sévère et assurée par la Feldgendarmerie.

Horaire : de 8h à 14h et de 15h à 19h.

Nous étions dans de grandes salles au 3e et au 4e étage.

Je n'ai pas pu sortir de ce camp de la gare d'Austerlitz du 13 mars au 15 août 1944. Le 15, j'ai été transféré à Drancy en vue, cette fois, d'être déporté en Allemagne. Cependant, grâce à la résistance, ce transfert n'a pas eu lieu. J'ai été libéré le 19 août." (6)

 

La gare d'Austerlitz

 

(1) Dans le dossier individuel du service des victimes de la guerre à Bruxelles, le nom est aussi orthographié : Libschitz.

(2) Page 108 du blog.

(3) Le convoi 66 est composé de 221 enfants (moins de 18 ans), de 515 femmes et de 632 hommes. A Auschwitz, seules 55 femmes et exactement 236 hommes ne furent pas immédiatement envoyés à la chambre à gaz. En 1945, n'avaient survécu que 30 femmes et 42 hommes. Avec un seul "Mazurois" encore en vie : Vital Lieberman (voir liste alphabétique p. 88).

(4) Dossier individuel SVG, Relation 547/21336.

(5) En réalité, le camp est consigné le 4 suite aux 6 évasions du kommando de Revin (P. 90 du blog). Et vidé dans la nuit du 4 au 5 janvier 1944.

(6) Encore en ce début du XXIe siècle, les commémorations de la libération de Paris "oublient" celle du camp de Drancy !

 

 Vue aérienne des HLM en forme de U et devenues le Sammellager de Drancy (Mémorial)

 

Publié dans Déportés

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